Pour que jamais l’oubli ne devienne une complicité...
Je n’avais pas prévu de partager un extrait de mon roman aujourd’hui. J’avais prévu de finir certains ajustements, de poser un contexte avant d’en parler, d’introduire mes personnages et de vous emmener doucement dans leur univers. Je voulais essayer de tout contrôler comme d’habitude... Mais parfois, la réalité vient bousculer nos plans. Il faut savoir composer avec l’instant présent.
Ecrire, c’est aussi ça : être à l’écoute du monde, de ses résonances, et laisser l'inspiration nous cueillir quand elle le décide.
Depuis hier, les réseaux sociaux sont inondés de témoignages : on parle des horreurs commises à Auschwitz parce que le 27 janvier 1945, le monde découvrait toutes ces vies brisées par la barbarie. Je ne vais pas ajouter à cela une énième publication solennelle, non, j'ai plutôt voulu me pencher sur la notion de "commémoration". Dans notre monde qui est saturé d'informations éphémères, commémorer prend un sens encore plus fort. Ce qui est fascinant dans ce mot, c'est qu'il ne signifie pas simplement se rappeler, mais faire acte de mémoire. Le verbe d'action est un pont entre le passé et le présent.
Je ne suis pas juive. Je n’ai pas de proches qui ont vécu ces horreurs, ni de témoins directs dans ma famille qui m'y ont spécialement sensibilisée. Pourtant, cette période de l’Histoire m’a toujours intriguée. Je l'ai lue, étudiée, et questionnée tant de fois.
Et puis un jour, un peu par hasard, j’ai découvert une malle dans une brocante. Une malle remplie de lettres, de fragments de vie, de mots écrits par une femme ayant presque traversé 1900.
Ces lettres m’ont bouleversée. J’ai passé des jours entiers à les lire, absorbée par ces témoignages intimes et à découvrir leurs pensées couchées sur le papier. Des voix du passé qui refusaient de se taire. C'est comme ça que j’ai su qu'il était temps d'en faire quelque chose. Elles portaient un message qu’il fallait transmettre. Il fallait commémorer...
Il m’a fallu deux ans pour comprendre comment. Deux ans pour bâtir un socle autour de cette découverte, pour lui donner du souffle et du sens. J'avais envie de la partager pour qu’elle puisse toucher ceux qui, comme moi, cherchent à comprendre, à ressentir, ou tout simplement à ne pas oublier.
C’est pour ça que j’écris, je crois. Pour raconter, oui, mais surtout pour transmettre. Pour que tout ce que nous traversons ne soit pas juste des dates et des événements consignés dans des archives poussiéreuses. C'est pour redonner un peu d'éclat et de lumière à ces vies, ces rêves avortés et ces promesses brisées.
Elle en est remplie, ma malle aux trésors, de ces espoirs griffonnés à la hâte sur un bout de papier, dans l’urgence de laisser une trace, et de dire "J’ai existé."
Aujourd'hui, plus que jamais, il faut écouter ces voix. Il y a des histoires qu’on n’écrit pas seulement pour soi, mais pour tous ceux qui, un jour, ont écrit avant nous, dans l’espoir que quelqu’un, quelque part, prenne le relais. J'ai souhaité porter ces voix, et vous les retranscrire à ma manière pour qu'elles ne tombent pas dans l'oubli.
Se souvenir, ce n’est pas seulement regarder en arrière. C’est un choix. Un acte de résistance. C’est refuser de laisser l’ombre recouvrir la lumière.
Et la lumière, de temps en temps, elle commence par un simple mot.

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